Tout le bleu du ciel
Je viens de terminer ce magnifique roman de Melissa Da Costa.
J'ai l'impression d'avoir mis longtemps à le lire.
Il est vrai que j'ai été un moment incapable de fixer mon attention, et donc incapable de lire. Mais quand même, je n'aurais pas dévoré ce pavé de 820 pages. J'ai préféré le savourer, page après page.
Peut-être pour ne pas arriver trop vite à la fin, que l'on sait tout de suite inéluctable.
A 26 ans, Emile est atteint d'un Alzheimer précoce provoqué par une maladie orpheline. Son avenir est tout tracé : deux ans d'espérance de vie avec une mémoire qui va peu à peu s'effacer.
Il vit à Roanne et ses parents souhaitent le voir s'inscrire dans un processus d'essai thérapeutique. Sa mère et sa soeur Marjorie fondent de gros espoirs sur cet essai.
Mais Emile ne veut pas devenir "un rat de laboratoire" et vivre ses derniers mois à l'hôpital.
Alors, en cachette, il achète un camping car et décide de partir, sans rien dire à sa famille. Il veut vivre au maximum, voyager sans contrainte.
Pourtant, avant de partir il a idée de poster une petite annonce, sans réel espoir de réponse "jeune homme de 26 ans, condamné par un Alzheimer précoce, souhaite prendre le large pour un ultime voyage. Recherche compagnon(ne) d'aventure pour partager avec moi ce dernier périple"
Contre toute attente, son annonce reçoit une réponse et trois jours plus tard, Emile retrouve sur un parking, Joanne, une jeune femme coiffée d'un grand chapeau noir.
Commence alors le voyage, sans but. Un voyage qui mène ce drôle de couple dans les montagnes pyrénéennes, dans de minuscules villages, des communautés...
Joanne semble avoir beaucoup lu, connait beaucoup de citations mais parle peu, à part de rares évocations de son père. Elle passe de longues heures seule, assise, les yeux fixés vers le ciel...
Emile se demande souvent qui est Joanne, pourquoi elle a quitté sa vie pour le suivre. Il ne pose pas de questions, mais en partageant le quotidien de cette mystérieuse compagne, il va apprendre à vivre différemment, à regarder autour de lui, à faire les choses en pleine conscience pour savourer l'instant présent.
Il nous faudra attendre la 500ème page pour connaître l'histoire de Joanne, pour comprendre ce qu'elle a fui, les raisons de son silence et de son air absent.
Mais on n'est pas pressé de le savoir. Tout au long du roman on se laisse emporter par la beauté des paysages décrits, par les belles rencontres, par la finesse et la justesse des sentiments, par l'amitié puis l'amour naissant, par la peur de l'un face à ses pertes de mémoire et de contrôle, par l'apparente sérénité de l'autre, la confiance réciproque...
La couverture du livre porte un avis de l'Obs "un dénouement d'une grande beauté".
Ce dénouement, on le connait dès qu'on ouvre le livre, même si on espère un miracle, si on le voudrait différent.
Mais il est vrai que la fin est magnifiquement écrite, pleine de respect et de pudeur.
Je ne connaissais pas cet auteur mais j'ai adoré son écriture et c'est sans doute avec beaucoup de plaisir que je la retrouverai dans un autre roman.
J'ai acheté celui-ci sur un coup de coeur, après avoir lu la 4ème de couverture. Mon instinct ne m'a pas trompé...